Les valeurs fondamentales du chrétien

Matthieu 5, 13-16

La bonne nouvelle  de ce texte est de tradition triple et se situe dans le plus grand discours de Jésus appelé sermon sur la montagne constitué des chapitres 5 à 7 du premier évangile, et se place dans la suite de l’admirable enseignement des Béatitudes (Mt 5, 1-12). Il faut relever qu’entre ce texte et celui des béatitudes, il y a un rapport très étroit lequel est marqué par l’emploi emphatique du pronom de la 2ème personne du pluriel ‘’vous’’ mis pour les disciples. Jésus, passé maître dans l'art d'utiliser les choses ordinaires pour illustrer les réalités spirituelles, prend  ici l’image du sel et de la lumière, afin de décrire le rôle de ses disciples dans le monde. Ces paroles révèlent aux disciples, leur nouvelle identité : « sel de la terre et lumière du monde. ». Dans cette identité, deux vocables importants méritent d’être examiné : sel et lumière

Le sel en chimie est un  composé qui se forme par l'action d'une base sur un acide (oxydoréduction).  Dans le domaine culinaire, le sel est une substance blanchâtre cristallisée, de saveur piquante, soluble dans l'eau à toute température, utilisée pour la conservation ou l'assaisonnement des aliments. L'utilisation la plus familière du sel est l'assaisonnement. Le sel est un constituant essentiel dans l'alimentation des êtres humains et des animaux à sang chaud. Les ions chlorure et sodium jouent un rôle essentiel dans la conduction de l'influx nerveux, dans la contraction musculaire et dans la rétention de l'eau par l'organisme. Une personne en bonne santé doit consommer entre 10 et 15 grammes de sel par jour, cette quantité étant en grande partie apportée par le sel contenu naturellement dans les aliments (viande, poisson), indépendamment de tout assaisonnement. Le sel de table courant contient souvent de petites quantités de iodures, ajoutées pour empêcher l'apparition d'un goitre. Les animaux sauvages se rassemblent souvent près des rivières salées où ils lèchent les efflorescences de sel, appelées salants.

Important depuis les temps préhistoriques comme agent d'assaisonnement et de conservation des aliments, le sel était également utilisé dans les rites religieux des Grecs, des Romains, des Hébreux et des Chrétiens. C'était un important moyen d'échange dans les voyages commerciaux sur les mers Méditerranée, Égée et Adriatique.

Et à l'époque de Jésus, le sel était utilisé essentiellement pour empêcher la dégénérescence des aliments. Le réfrigérateur n'existant pas, cet ingrédient jouait alors un rôle de premier plan pour la conservation de la viande et du poisson, comme c'est encore le cas aujourd'hui dans certaines régions du monde. Le sel intervient aussi  dans la transmission des signaux nerveux, la contraction musculaire et le fonctionnement des reins en assurant une bonne hydratation. C’est un antiseptique, qui a la propriété de détruire les microbes et les bactéries susceptible de provoquer des maladies. Ainsi  le sel est un révélateur, un exhausteur et aussi un conservateur.

Dans la bible, le sel donne goût et saveur (Job 6,6). Il assainit, purifie et vivifie. On connaît bien sa symbolique biblique. Il figure la sagesse, exprime l’amitié, traduit l’animation, manifeste  la joie fraternelle, décrit  la vie (Col 4,6).

C’est dire toute la richesse de cette première image employée, à notre endroit, par le Christ dans l’Évangile de ce jour. ‘’Vous êtes le sel de la terre’’Étant donné que c’est le sel qui, dans n’importe quel plat, relève la saveur et le fait apprécier, le Seigneur prend donc cette analogie pour faire saisir à ses disciples, de façon pratique, ce qu’il veut les concéder. 

C’est pourquoi à  l’image du sel relevant la saveur des aliments, les chrétiens ayant reçus les vertus théologales du baptême relève la saveur de l’histoire humaine et de tout ce qui nous vient de Dieu. Leur présence dans le monde donne à celui-ci une saveur particulière, un goût de vie et d'espérance. Face à la triste uniformisation du monde, les chrétiens mettent leur grain de sel, fait d'espérance, de tempérance, d’abstinence  de pénitence, de confiance et de grâce.

Toute notre société et même nos paroisses  ont besoin de l'influence de ce sel constitué par la présence des vrais disciples de Jésus, sinon, elles risquent la décomposition, la décrépitude et la déchéance de ses composantes sociales. L'enseignement du Christ, vécu et transmis par l'Eglise, est vital pour la bonne santé de notre monde. Cette réalité se vérifie d'autant plus aujourd'hui, dans notre société en perte de sens et de repère. Ce que nos parents hier appelaient abomination est devenue la norme pour plusieurs.

Le rejet progressif des valeurs fondant notre société a eu pour effet sa déstructuration. Il n'est donc pas étonnant d'entendre aujourd'hui parler de "perte de repères" et de ''décomposition du tissu social''.  Avec leur sel, les chrétiens doivent apporter en toutes choses une sapidité nouvelle. Cette saveur n'est pas faite de valeurs intangibles, mais d'une manière de vivre ayant le goût et donnant le goût de la présence de Dieu. Cet ingrédient donne aussi une saveur incomparable aux aliments. De même, le chrétien doit apporter du goût et de la saveur au monde dans lequel il évolue. Sa paix, son amour, sa patience, sa bonté, fruits de la présence du Saint-Esprit dans sa vie, donnent envie à ceux qui l'entourent de consommer avec appétit l’évangile du  Christ.

Il s’agit donc tout d’abord de rester dans ce monde sans être de ce monde (Jn 17,15) ; c’est-à-dire de ne pas nous affadir, en nous fondant dans la masse et de ne pas vivre en simples reflets de toutes les modes au goût du jour. Diognète dans les premiers temps apostoliques disait  «Notre différence chrétienne est une richesse pour le monde», il renchérit en disant : «les chrétiens sont des hommes comme tout le monde, mais qui ne vivent pas comme tout le monde». Le sel comme antiseptique désinfecte notre conscience et peut émouvoir profondément et même troubler la conscience de ceux qui agissent mal. Le sel n'est pas un aliment, mais un condiment. Le Seigneur attire notre attention uniquement sur sa propriété et sur son influence, car le sel, à dose modérée dans les aliments favorise notre appétit et provoque la soif.

Mais de nos jours c’est comme si le sel de certaines personnes  est soit insuffisants soit en excès. Or un  excès de sel augmente le risque d’hypertension artérielle, facteur de risque de maladies cardiovasculaires et auto-immunes  comme le diabète de type 1,  l'ostéoporose, la sclérose en plaques ou encore la polyarthrite rhumatoïde. Quand il y a insuffisance le repas est fade et pas appétissant.

Oui nous savons aussi qu’il y a des personnes  atteintes  de la sclérose ou de la polyarthrite rhumatoïde spirituelle. Ce sont celles-là pour qui il y a toujours de l’excès dans ce qui font. Elles ont un zèle excessif et débordant et à la limite impétueuse. Elles  sont partout et finalement nulle part. Elles  critiquent tout. Ce sont des donneuses de leçons 

Ceux des chrétiens fades sont reconnus par leur timidité outrancière et disproportionnée. Ils sont là, passifs,  défaitistes, alarmistes et pessimistes. Ils voient le mal partout. Ils sont tièdes c’est-à-dire ni chauds ni froids devant les situations de la vie et même de la vie.  Ils sont toujours sujet a des jérémiades et refuse tout effort. Ce sont ceux-là qui refusent d’affronter les difficultés et devant le miroir casse le miroir au lieu de chercher à changer ce qui ne va pas sur leur visage.

En effet J .Calvin écrivait en 1561: « Que les saleurs s’avisent cependant de ne pas nourrir le monde en sa folie et fadasse et beaucoup plus encore de ne l’infecter de quelque mauvaise saveur » C'est pour cela que Jésus dit aussi, dans le même verset de l'évangile : Mais si le sel devient fade, avec quoi le salera-t-on ? Il n'est plus bon qu'à être jeté dehors et foulé aux pieds par les hommes (Mt 5.13). En effet, cette époque, le sel n'était pas aussi pur que celui qui tombe de nos salières. Il comportait une forte proportion de cristaux analogues, par leur aspect, au chlorure de sodium, mais n'en possédant pas la puissance assaisonnante. Quand le sel ainsi composé était mis en contact de l'humidité ou de l'eau, le chlorure de sodium fondait et il ne restait plus que les autres cristaux sans valeur : le sel avait perdu sa saveur. Il était alors jeté  par terre et foulé aux pieds. Il en est subséquemment de celui qui ne se laisse plus transformer par le Christ. Sa vie devient insipide.  Il devient même  la risée de ceux qui l'avaient entendu et vu auparavant rendre témoignage de sa foi.

La deuxième représentation employée par Jésus est celle de la lumière qui se définit comme étant un rayonnement ou une radiation qui éclaire. La lumière est due à des oscillations extrêmement rapides d'un champ électromagnétique dans une gamme particulière de fréquences perceptibles par l'œil humain.

En physique c’est un  rayonnement électromagnétique visible. La lumière à un rôle important dans certains phénomènes chimiques, comme par exemple, en photographie. La lumière solaire est utilisée par les plantes vertes dans la photosynthèse.

La lumière,  contextuellement parlant est, dans le la bible, une métaphore courante, car le Christ  comprend  la mission du chrétien dans le monde comme étant celle de faire briller la lanterne de la parole de Dieu.

La vocation d’être maintenant « lumière du monde », est de mettre au service de Dieu sa vie toute entière, corps et âme, parole et geste, enseignement et témoignage, et le tout librement, comme une réponse à sa grâce.

Il convient donc tout d’abord de noter que, tout comme pour le sel, cette lumière n’a pas sa source en nous. Nous n’en sommes que le reflet, le relais et le témoin (Jn 1,8).  Cette lumière cependant n’est pas celle de la brillance, du prestige ou de l’éclat. Elle est celle de la grâce. De cette vie intérieure mise en nous par le Créateur, lavée par le baptême, éclairée par la prière, illuminée par les sacrements, et qui reflète une présence. Celle de «l’Hôte intérieur».

C’est pourquoi Le chrétien doit être à la fois récepteur de la lumière du christ  et propagateur ou diffuseur de cette lumière à ses semblables sans interruption. Pour l’être il faut connaitre sa fonction avant de  les appliquer.

Ainsi, La lumière éclaire.  Elle fait voir le jour à ceux dont on a barré la vue.  Elle chasse les ténèbres, met au clair rassure.  Elle met en confiance les sceptiques et les délaissés. Potentialité exige, les ténèbres ne peuvent subsister en face de la lumière.  Elles sont ennemies jurées.  Si petite soit-elle, là où une lumière luit, la noirceur s’enfuit. Cette lumière n’éblouit pas les yeux comme de nos jours avec ses ‘’chrétiens plein phare’’ c’est-à-dire hypocrite et sournois.

La lumière embellit.  Elle perce les mystères et dévoile les secrets les plus dissimulés.   Ainsi, elle permet de retrouver ce qui était perdu (Éphésiens 3. 9). Le chrétien est un homme ou une femme dont la beauté extérieure et intérieure ne doit laisser personne indifférente et de ce fait nous sommes appelés à nous entretenir pour extérioriser la lumière de Dieu qui est en Nous.

La lumière protège et guide.  Elle nous empêche de nous heurter contre les obstacles.  Ainsi, David va dire : « Ta Parole est une lampe à mes pieds et une lumière sur mon sentier » (Ps 119. 105).

 Etre lumière du monde consiste à se laisser soi-même guider par les paroles du Christ, par son enseignement et non par celui de nos pères et de la tradition seulement. Etre lumière du monde, c’est vivre, simplement, explicitement, ouvertement et librement sa foi, de sorte que ceux qui ne connaissent pas le Christ et son enseignement le discernent avec nous.

La lumière permet de retrouver ce qui était perdu.  La parabole de la drachme perdue prouve cette fonction de la lumière (Luc 15. 8-10). La lumière, en effet, révèle. En dissipant l'obscurité, la lumière permet de voir les choses telles qu'elles sont. La lumière rassure et réconforte.  Or on reproche plutôt aux chrétiens leur obscurantisme. Ils sont devenus presque des  lumières perverties ou des lumières noires. Même le réconfort qu'ils prétendaient apporter est compris comme une médecine intéressée ou orientée. En dissipant l'obscurité et en guidant jusqu'à Dieu, les chrétiens doivent être  pour les autres des lumières qui rassurent.

Signalons que  cette image est presque aussitôt prolongée, et comme atténuée, par une seconde figure toute empreinte de modestie. Celle de la lampe que l’on n’allume pas pour la mettre sous le boisseau, mais bien sur le chandelier afin qu’elle éclaire tous ceux qui sont dans la maison (5,15). Pour preuve Dieu nous donne la lumière du soleil à tous !

 Que conclure

 Dans cette union entre le sel et la lumière, le Christ nous invite à faire resplendir la lumière individuelle ou le génie  de notre vie afin qu’elle soit le reflet de la flamme d’amour de l’Esprit Saint reçu au jour du baptême et résidant dans le cœur du baptisé (2 Co 1, 22). Le chrétien est  source de lumière et d’humanisation dans un monde plongé dans l’obscurité et la fadasse de l’indifférence voire même du mépris alors comme disait Bonhoeffer. « Soyons Eglise visible dans ce monde, dans notre voisinage et notre cité, y compris dans la vie sociale et politique, par nos engagements et notre service désintéressé »

Amen !!!



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